Braquage en série noire
J’avais prévu un plan d’enfer. Un road-movie littéraire passant par les librairies des principales villes de France. De quoi réunir la majeure partie de l’édition de son dernier livre. Pour faire diversion face aux flics, j’avais prévu des leurres : entartrer le dernier opus de BHL, faire hara-kiri au dernier ouvrage d’Amélie Nothomb ou encore réunir en tas tous les bouquins parlant de Sarko et y mettre le feu, façon Fahrenheit 451. Pour qu’il sache que c’était moi, j’aurais laissé chaque fois un message codé, que lui seul pouvait identifier.
« Putain de lundi » (1) tagué sur la vitrine de la librairie, avant de partir en courant, la pile de livres sous le bras, me noyant dans la foule anonyme. Ou bien encore, faire livrer des fleurs pour Jean Jaurès (2) à l’adresse de la librairie que je venais de dévaliser. A force, les flics, même s’ils ne sont pas lecteurs, aurait fini par remonter jusqu’à son dernier éditeur, Ravet-Anceau, s’étonnant qu’à chaque braquage de librairie, c’était en final une vingtaine d’exemplaires de son dernier livre qui disparaissait. Je comptais sur le fait que l’éditeur se décide à l’appeler : « Monsieur Willi, on a un problème, quelqu’un vole systématiquement votre dernier livre. Vous avez pas une idée, vous qui écrivez des polars, sur l’identité de ce détraqué ? » Sûr qu’il ne pouvait alors que penser à moi, une fois mis au parfum des indices délibérément laissés sur mon passage. On n’efface pas son passé d’un trait de plume. J’avais fait le calcul : trente sept ans et demi que l’on s’était rencontré pour la première fois sur les bancs du collège. Même sans régimes spéciaux, on était proche de la retraite, avec ou sans l’accord de Fillon. A l’époque, il dessinait déjà des plans de bateaux pendant que je gravais « Amour-anarchie » sur le plateau de bois de la table que nous partagions au fond d’une salle de classe, près du radiateur qui maintient les cancres au chaud dans l’espoir de les anesthésier tout à fait. Nos échanges se renforçaient quand on se retrouvait aux beaux jours sous l’ombre du même platane, dans le parc à côté du lycée. Nous refaisions le monde, rêvions d’avenir, préparions nos armes pour les prochains combats. On découvrait l’écologie en écoutant en boucle Echoes des Pink Floyd, faisions la nique à la vieille droite en bombant ses publicités électorales. On s’échangeait des bribes de vie au point que je ne sais plus bien qui apportait quoi à l’autre : La gueule ouverte qui était le premier journal écolo édité en France, les premières clopes, premiers pétards, premières nanas, premières embrouilles, premières vacances comme des grands, à bivouaquer dans les Cévennes, sac au dos et sans tente. Premiers boulots aussi. Et puis nos vies ont bifurqué, ou plutôt je me suis enlisé tandis qu’il continuait sa route : trente six métiers, trente sept misères, deux voiliers, deux livres édités, beaucoup d’autres au fond d’un tiroir, des kyrielles de tableaux prêts pour la prochaine expo. Mais là, je tenais ma vengeance : l’exclusivité sur son dernier bouquin ! Mon plan était imparable. Une fois en possession du stock, quelques milliers de livres, j’en ferai une inclusion sous résine et m’en servirai de pied de table. Dessus, j’y poserai une épaisse plaque de verre. J’aurai tout le loisir de découvrir sa dernière livraison.
Enfin ! C’est ce que je croyais, jusqu’à ce que mon chef me refuse les congés que j’avais posés. Mon projet de braquages prenait l’eau… A moins que … A moins que, cher lecteur, tu ne me viennes en aide. Ces hold-up c’est toi qui les fera. Le plus tranquillement du monde, tu iras chez ton libraire habituel, tu lui demanderas poliment le dernier Pierre WILLI « Braquage à Fives » (3) ça s’appelle. A la caisse, tu sortiras calmement de ta poche les onze euros demandés, en posant sur le comptoir tes mains bien visibles. Tu pourras même en acheter plusieurs, les offrir à tes ami(e)s, aux passants, à ton patron, ton ou ta fiancée, au journaliste chargé des faits divers dans ton journal local. J’imagine la tête qu’il fera, mon ami Pierre, quand l’éditeur l’appellera pour lui dire : « Monsieur Willi, on a un problème, il va falloir qu’on réédite votre dernier polar. »
PS : Pierre WILLI n’est pas un personnage de fiction. C’est vraiment mon pote et son dernier livre Braquage à Fives est en librairie depuis début novembre.
(1) Putain de dimanche est le titre du livre de Pierre WILLI paru chez Gallimard à la Série noire (n° 2545- 1999) (2) Les fleurs de Jean Jaurès est le premier roman de Pierre WILLI. Il a obtenu le prix « A la découverte d’un écrivain du Nord-Pas de Calais » en 1996. Edition La main à la plume. (3) Braquage à Fives de Pierre WILLI, édition du Ravet-Anceau – 2007.
mardi 6 novembre 2007
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1 commentaire:
Je vais tenter de répondre sincèrement à ta question sur la kinésiologie.
Je pense que cette technique thérapeutique, pour l'avoir approché de près, se veut TROP être une solution à elle toute seule et qu'elle n'a pas l'humilité de reconnaître qu'elle ne peut l'être… parce qu'en voulant traiter nos ”difficultés quotidiennes” sur tous les fronts, elle reste dans le superficielle et cette méthode ne règle rien en profondeur.
Elle facilite peut-être une prise de conscience, mais elle partage cela avec d'autres thérapies qui favorisent la même chose… et jusqu'à preuve du contraire, il n'y en a pas une qui fonctionne mieux qu'une autre… parce qu'elles passent toutes, mon humble avis, à coté de l'essentiel.
Il n'y a pas de thérapie miracle, cela se saurait… il y a juste une prise de conscience sur notre responsabilité, nous les êtres humains, vis-à-vis de notre Vie et dans le meilleur des cas -- de la Vie en général.
Ce que je reproche aux thérapies aujourd'hui c'est qu'elles basent toutes le soin sur la réparation : réparation des traumatismes de l'enfance, réparation du passé etc. et qu'elles se reposent sur ce précepte surannée. (ce n'est que mon opinion !)
Tant que nous restons enfermé dans notre système de pensée, nous en restons prisonnier… Nous construisons nous-même les barreau de notre prison ~ et ça nous savons fort bien le faire…
Je pense que l'on devrait commencer à apprendre les lois de la nature aux petits enfants et ce le plus tôt possible.
Je pense que l'on devrait ”colorer” la vie de nos enfants en leur inculquant la valeur des lois universelles qui régissent la vie en générale… jusqu'à décliner ses lois pour eux…EUX qui sont le monde à eux tout seul !
Utopie, certes… mais c'est toujours mieux que de les enfermer dans nos systèmes de pensées appauvris en les grugeant dès le départ des infinies possibilités que leur offre la vie…
Ce sont nos systèmes de pensées qui sont à l'origine des conflits PLANETAIRES comme ils sont à l'origine de nos petits conflits individuels …
Tant que nous croyons que nos pensées sont la réalité, nous restons prisonnier de ce système…
Pour guérir du passé, je suis intimement convaincu qu'il nous faut commencer par nous ouvrir aux lois universelles, nous ouvrir à la vérité…On ne possède pas la vérité, elle s'ouvre à nous!
Si je suis consciente des réalités distinctes, je m'offre une ouverture du cœur – je suis, alors, en capacité de passer de l'intolérance à la tolérance et à la compréhension.
La kinésiologie, pourquoi pas…! Si cela peut faire avancer un bout de chemin…mais elle n'est pas le chemin.
Cathy
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